Oumou Keita
Former Senior Program Officer, West & Central Africa Region
April 15, 2022
Former Senior Program Officer, West & Central Africa Region
En Afrique francophone, les jeunes âgés de 15 à 24 ans ont difficilement accès aux informations et services de planification familiale (PF) de qualité. De plus, ils affichent un taux d’abandon de la contraception supérieur à celui de leurs aînées et sont particulièrement sensibles aux effets indésirables. En mars 2022, PRB a tenu une série de quatre webinaires s’inscrivant dans la suite du dialogue initié en 2021 sur l’utilisation durable des contraceptifs chez les jeunes. L’initiative est portée par le projet PACE, financé par l’Agence Américaine pour le Développement (USAID) en collaboration avec le projet Knowledge SUCCESS. La série a réuni différents représentants du Ministère de la Santé, d’organisations de jeunes, de leaders religieux, et de Partenaires Techniques et Financiers (PTF) engagés dans l’amélioration de l’accès à la contraception par les jeunes. L’accès durable des jeunes à la PF a été discuté, sur la base d’une analyse du paysage politique des pays du Partenariat de Ouagadougou (PO), réalisée par le projet PACE. Les outils de communication développés par ce même projet pour renforcer le dialogue sur la PF pour les jeunes informés par des données probantes ont été présentés pour soutenir les échanges.
Le paysage politique pour l’utilisation durable de la contraception par les jeunes dans les neufs pays du PO a été analysée sur la base de sept recommandations définies dans une note de politique rédigée par PRB en 2021. Ces recommandations visent à assurer que tout jeune accède, sans discrimination, à la méthode contraceptive de son choix quand et où il le souhaite. L’examen des documents politiques et règlementaires de différents pays, notamment les engagements FP2030, les lois relatives à la Santé de la Reproduction (SR) et les Plans d’Action Nationaux Budgétisés de la Planification Familiale (PANB/PF), montre que dans l’ensemble, l’environnement politique des pays demeure peu favorable à l’utilisation durable de la contraception par les jeunes. La plupart des pays reconnaissent les jeunes comme un groupe aux besoins spécifiques, mais l’accessibilité financière, le suivi personnalisé et l’accès à toute la gamme de contraceptifs, particulièrement aux méthodes auto-administrées, sont largement insuffisants. Les panélistes ont débattu des priorités pour leurs pays respectifs.
En Guinée, l’insuffisance des ressources domestiques, le contexte socio-culturel et le manque de services adaptés aux jeunes sont les obstacles à surmonter. La disponibilité de la gamme complète des produits contraceptifs est relevée comme essentielle, problématique actuellement traitée par un engagement dans l’élargissement de l’offre de produits dans les infirmeries scolaires, le secteur privé et les garnisons militaires. Cette dynamique s’appuie également sur la collaboration avec les organisations de la société civile, les PTF et la participation active des jeunes.
Au Sénégal, la prise en compte de la diversité des besoins des jeunes est identifiée comme prioritaire, considérant leur hétérogénéité en termes d’âge, de statut marital et de milieu de vie. Les organisations de jeunes saisiront l’opportunité du nouveau PANB/PF pour améliorer l’accès à la contraception pour les jeunes non mariés – ignorés dans les documents actuels. Enfin, la RDC (pays extérieur au PO) met la priorité sur la facilité d’accès à la contraception dans le secteur privé. Des organisations de jeunes y ont mené un plaidoyer informé par des données pour la reconnaissance des besoins spécifiques des jeunes, et obtenu la signature par le gouvernement provincial, d’un arrêté soutenant un plan quinquennal pour l’accès des jeunes à la contraception, intégrant leur diversité.
Le rôle des leaders religieux pour démystifier les tabous autour de la PF pour les jeunes et renforcer un dialogue informé par des données est largement démontré. Des vidéos produites par le projet PACE en collaboration avec des leaders religieux et des jeunes du Sahel ont illustré l’engagement des diverses confessions religieuses dans la promotion de l’utilisation de la contraception par les jeunes afin d’assurer le bien-être de la mère et de l’enfant. Et si leurs messages s’inscrivent dans le contexte du mariage quel que soit le pays, l’accès à la contraception pour tous les jeunes, y compris ceux non-mariés, est pris en compte dans les politiques de pays laïcs comme le Mali ou la RCA. Au Mali, des campagnes annuelles offrent les services de PF à toutes les utilisatrices sans restriction, en cohérence avec les principes de non-discrimination, particulièrement pour les jeunes, avec l’appui des PTF.
Tous les panélistes reconnaissent l’importance d’informer la communication sur la PF avec des données probantes – telles que celles des enquêtes nationales Enquête Démographique et Santé (EDS) et Enquête en grappes à multiples indicateurs (MICS) – mais constatent qu’elles restent insuffisantes pour alimenter les dialogues et le plaidoyer. Les données existantes, souvent quantitatives et informant sur un temps donné, ne permettent pas de comprendre la dynamique de l’utilisation de la contraception par les jeunes. Des analyses secondaires des données nationales peuvent aider à expliquer l’abandon de la contraception et à comprendre l’impact des effets secondaires afin d’améliorer les messages tant pour les décideurs politiques que pour la communauté. Elles sont également importantes pour démontrer, par exemple, le rôle la PF pour la réduction de la mortalité maternelle et néonatale et des grossesses précoces. La nécessité d’un cadre de gouvernance et de coordination des données produites par les EÉtats et les PTF a été également soulignée. Les PTF sont encouragés à publier sur leurs sites les données qu’ils produisent pour un meilleur suivi des engagements dans le cadre du PO et de FP2030.
La recommandation politique sur la reconnaissance des besoins propres aux jeunes et celle sur la disponibilité d’une gamme complète de contraceptifs ont été spécifiquement discutées. Les panélistes (Ministère de la santé, organisation des jeunes et PTF) ont relevé les progrès réalisés, tels que l’approbation du programme d’éducation aux valeurs et à la santé sexuelle au Togo, la promotion par les autorités de RDC d’espaces conviviaux “jeunes” dans les structures de santé et la communauté, ou encore que les lois SR de leurs pays (Mali, RDC, Sénégal et Togo) intègrent l’utilisation de la contraception par les jeunes. Cependant, ce cadre légal reste insuffisant ou fait face aux pesanteurs socio-culturelles. En RDC, la loi restreint le choix des méthodes contraceptives accessibles sans l’autorisation des parents pour les 15-17 ans, et interdit l’accès sans consentement parental aux moins de 15 ans. Au Mali ou au Togo, la faible compétence des prestataires de santé en counseling adapté aux jeunes, les préjugés, leur fréquentation des centres de santé et l’influence de leaders religieux conservateurs représentent des obstacles majeurs. Malgré l’engagement croissant de la société civile et des chefs religieux, les barrières socio-culturelles demeurent. Le constat est unanime quant à l’absence d’améliorations notables pour l’accès des jeunes à la contraception et sur la nécessité impérative de renforcer leur reconnaissance et leur implication comme acteurs à part entière des processus de formulation des politiques et programmes.
Le paysage politique des pays du PO demeure peu favorable à l’utilisation durable de la contraception par les jeunes. Malgré des progrès en termes d’engagements forts et d’adoption de textes règlementaires, les jeunes font face à plusieurs défis pour accéder durablement à une méthode contraceptive moderne quand et où ils le souhaitent. Les restrictions fondées sur l’âge, le coût, les préjugés des prestataires sont autant d’obstacles qui doivent disparaître. Face à cette situation récurrente, la participation des jeunes n’est pas optionnelle. Ils représentent la majeure partie de la population et doivent être pleinement impliqués dans la formulation des politiques qui les concernent et qui construisent leur futur. Ils doivent disposer du savoir nécessaire pour être entendus et assurer la prise en compte effective de leurs besoins spécifiques. Acteurs à part entière de la communauté, ils sont les alliés des gouvernements. Dans des sociétés fondamentalement guidées par la foi, les chefs religieux sont une force pour renforcer le dialogue et démystifier les fausses croyances. Leur collaboration avec les jeunes pour provoquer des changements positifs dans la communauté doit alors être soutenue pour amplifier une communication pertinente basée sur des données probantes, utilisant des messages adaptés et partagés par tous.
Les ressources suivantes du projet PACE ont été partagées au cours de la série de webinaires :
Modératrice : Madame Aissata Fall, Représentante Régionale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre – PRB
Panélistes :
Modératrice : Madame Célia d’Almeida, Consultante en communication – Directrice ODEKA Médias & Formations
Panélistes :
Modératrice : Madame Célia d’Almeida, Consultante en communication – Directrice ODEKA Médias & Formations
Panélistes :
Modératrice : Madame Aïssata Fall, Représentante Régionale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre – PRB
Panélistes :